Bande dessinée : Le grand incendie de Rome
Atius s’est-il suicidé parce qu’il avait lancé une compagnie d’assurances spécialisée dans l’incendie et se savait ruiné par le désastre ? Son fils le croit, jusqu’au moment où le préfet du prétoire, le redoutable Tigellin, que la plèbe regarde comme le véritable responsable du drame, lui propose de l’aider à démasquer les coupables. Très vite, Gaius comprend qu’il a eu tort d’accepter ce marché. Mais avait-il le choix et que signifie ce mystérieux signe de la Salamandre cher à son père qui reparaît sur les départs de feu ? Pourquoi Tigellin semble-t-il si aise de s’en prendre à ces sectateurs d’une nouvelle foi que l’on commence d’appeler chrétiens ?
Force est d’admettre qu’en ce qui concerne la bande dessinée historique, l’école italienne, par la remarquable qualité de son dessin, sa couleur, sa précision et le sérieux de ses reconstitutions, demeure inégalable. Cet album le démontre une fois de plus en mettant sur un bon scénario, français, des images d’une exceptionnelle splendeur. L’on s’en étonnera moins, sachant que Lapo a longtemps travaillé dans la restauration de fresques. Superbe.
Anne Bernet
L’Aigle et la salamandre. Naissance dans le brasier (tome 1). Par Stéphane Piatzszek, Alessio Lapo, Giuseppe Quattrocchi, Éd. Soleil, coll. Quadrants, 48 p., 14,50 €
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Mai-juin 2005. 1945 : la guerre en questions. Nouveaux regards des historiens…
Mars-avril 2007. La République et la France. 1789-1989 : une histoire troublée…
Hors-série n°3 (automne-hiver 2011). La guerre de Sécession 1861-1865.
Mars-avril 2008. Noblesse et chevalerie. Chevaleries médiévales et templiers.
Le Moyen-Orient pendant la Seconde Guerre mondiale
L’auteur débute son étude par l’Égypte, puis traite du Levant, de la Palestine, de la Libye, de l’Irak et de l’Iran.
Plus la guerre avance, plus il devient clair aux yeux de tous les stratèges, civils et militaires, que le pétrole est une arme. C’est ce qui conduit les États-Unis – qui bénéficient encore d’une bonne image auprès de tous les dirigeants nationalistes arabes – à avancer leurs pions et à nouer des alliances à long terme, en particulier avec l’Arabie Saoudite.
Si Hitler a pu déclarer « Tout l’Islam vibrait aux nouvelles de nos victoires », l’auteur démontre parfaitement que l’Axe a négligé cette région et n’a pas arrêté de politique globale la concernant. Finalement, les Germano-Italiens n’ont trouvé de relais ni en Égypte, ni en Irak, ni en Iran. La connivence entre Islam et nazisme, rapportée par nombre d’auteurs est ici infirmée.
Le texte, très dense, est complété par 6 cartes, un index des noms de personnes et de nombreuses notes de référence. Il n’y manque qu’une idée maîtresse, capable de relier les chapitres les uns aux autres.
Max Schiavon
Le Moyen-Orient pendant la Seconde Guerre mondiale. Par Christian Destremeau, Perrin, 630 p., 12 €
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Mars-avril 2005. L’Amérique divisée. La guerre de Sécession 1861-1865. Le faux…
Mai-juin 2009. 1919-1939 de l'espoir au désastre. De Versailles à Dantzig…
Mai-juin 2003. La naissance du fascisme. Les hommes qui ont fait Mussolini…
Mai-juin 2007. Les femmes et le pouvoir. L'héroïsme au féminin. Les dégâts du…
Le Grand Fleuve. Jean Tambour (tome 1)
Là comme ailleurs, les choses ont bien changé : d’arrogants inconnus se sont installés en lieu et place du seigneur jamais revenu d’émigration et terrorisent la région, la Compagnie cherche par tous les moyens à s’arroger le monopole du flottage sur la Seine au détriment des petits chantiers locaux qu’elle s’acharne à ruiner, et des Chauffeurs ont recommencé à désoler la région comme aux pires temps de la Révolution.
Décidé à reprendre son ancien métier et son ancienne vie, Jean Tambour n’entend pas pour autant tolérer l’intolérable. Le matelot se mue en redresseur de torts. À ses risques et périls…
À travers les aventures d’un personnage qui se révèle attachant, Aillery et Hiettre ont décidé de faire revivre le quotidien des flotteurs et mariniers au début du XIXe siècle. L’entreprise est ambitieuse mais, si la suite tient ses promesses, la série, solidement documentée et bien conduite, promet d’être très intéressante.
Anne Bernet
Le Grand Fleuve. Jean Tambour (tome 1). Par Serge Aillery et Jean-Luc Hiettre, Éd. Paquet, 56 p., 14 €
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Juillet-août 2012. La Prusse et la France 1712-2012. Frédéric Le Grand vu d’Allemagne…
Mars-avril 2012. Crimes d’État et scandales politiques. L’assassinat de César. Louis…
Mars-avril 2013. L’Amérique, l’Europe et le monde. Obama II, l’Amérique change…
Novembre-décembre 2015. Scandales financiers, corruption politique. La…
Jeanne d’Arc, le procès de Rouen lu et commenté. Par Jacques Trémolet de Villers
La belle étude que publie maître Trémolet de Villers, en effet, apporte à ces textes si souvent lus et commentés, le regard, les connaissances, l’expertise du juriste, et surtout l’expérience, précieuse, de l’avocat qui, depuis les débuts de sa carrière, a plaidé quelques-unes des plus grandes causes politiques de notre époque. À ce titre, il sait mieux que quiconque combien, en pareil cas, les dés sont pipés et l’affaire entendue d’avance.
Jeanne n’aura pas échappé à ces vilenies d’une justice vendue au pouvoir. Son procès est même exemplaire des dérives du droit dès lors que les juges ne sont plus là pour rechercher la vérité et l’équité. Alors que, ces dernières années, il s’est rencontré des biographes pour trouver des circonstances atténuantes à l’évêque Cauchon, et même tenter d’en faire un saint homme calomnié, Jacques Trémolet de Villers analyse le jeu tordu d’un froid politique qui en oublie, définitivement, qu’avant d’appartenir à l’université de Paris, « lumière de la chrétienté » et d’être l’obligé de la couronne anglaise qui le stipende, il est évêque et se sert de ses pouvoirs pour arriver à ses fins. Un jeu qui fait, comme Trémolet le souligne, de Jeanne la première martyre de la laïcité quand celle-ci n’est rien d’autre qu’une saine et intelligente séparation du temporel et du spirituel.
Anne Bernet
Jeanne d’Arc, le procès de Rouen lu et commenté. Par Jacques Trémolet de Villers, Les Belles Lettres, 310 p., 24,90 €
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Mars-avril 2015. 1940 : l'étrange défaite. Les origines du désastre. Les communistes…
Juillet-août 2005. La Chine et l’Occident. Le miracle chinois de Mao à Confucius.
Septembre-octobre 2011. L’imprévu dans l’histoire. Octave, l’improbable fondateur…
Janvier-février 2013. La fin des Habsbourg. 1918 : une Europe assassinée. François…
Il est des hommages qui encensent pour mieux ensevelir. Ainsi celui de la République à Alain Decaux, disparu le 27 mars à l’âge de 90 ans. Par ses propos convenus, celle-ci a esquivé l’essentiel. Par exemple, en se gardant de rappeler qu’à peine élu à l’Académie française, en 1979 (au fauteuil de Jean Guéhenno), ce dernier avait pris la tête d’une vigoureuse campagne, dans Le Figaro Magazine, contre les menaces qui pesaient déjà sur l’enseignement de l’histoire. Cette campagne eut pourtant un retentissement considérable. À la mesure de la passion de son initiateur. De cette passion qui l’anima jusqu’à son dernier souffle. De cette passion pour l’histoire qu’il sut faire partager comme nul autre aux Français. Par ses livres, bien sûr (une soixantaine de titres (1), dont de nombreux best-sellers), mais surtout par ses émissions de radio et de télévision : à la radio, la mythique Tribune de l’histoire, créée en octobre 1951 avec André Castelot et Jean-Claude Colin-Simard (auquel succéda, neuf ans plus tard, Jean-François Chiappe) et qui, à sa disparition, à l’automne 1997, était la plus ancienne émission de France Inter, ayant conservé l’un des plus forts taux d’écoute ; à la télévision, la non moins mythique Caméra explore le temps (1957- 1966) – avec André Castelot et Stellio Lorenzi –, puis, à partir de 1969, Alain Decaux raconte – successivement rebaptisé L’Histoire en question (1981), Le Dossier d’Alain Decaux (1985) et Alain Decaux face à l’Histoire (1987) – où, seul face à la caméra, pendant plus d’une heure, il faisait revivre personnages, intrigues, énigmes, révolutions, coups d’État avec un luxe de détails inouïs ; sans compter ses pièces et scénarios écrits pour les grands spectacles de Robert Hossein.
« Alain Decaux, a bien résumé Franck Ferrand, était cet enchanteur érudit, cet historien-conteur capable de faire vibrer la France à l’assassinat de Jaurès, à la découverte de la tombe de Toutankhamon ou aux rebondissements de l’affaire Canaris […] » (Le Figaro, 30 mars 2016). Un « enchanteur érudit » venu à l’histoire grâce à Alexandre Dumas, auquel il consacra, en 2010, un émouvant Dictionnaire amoureux, son ultime ouvrage. Et grâce à G. Lenotre, l’auteur de Vieilles maisons, vieux papiers, « l’inventeur de la petite histoire […] » qui, explique-t-il dans ses mémoires (Tous les personnages sont vrais, 2005), lui permit « de passer, sans le trahir, de Dumas à une histoire non romancée ». Une histoire vivante, humaine, incarnée, à la manière d’un roman, mais d’un roman guidé par le souci scrupuleux de la vérité.
Profondément catholique, Alain Decaux penchait à gauche. Ne fut-il pas, de 1988 à 1991, ministre délégué à la Francophonie dans un gouvernement dirigé par Michel Rocard ? C’était avant tout un de ces esprits libres dont notre temps n’a plus guère l’idée. Admirateur de Sacha Guitry, le jeune Decaux était devenu son ami en gardant son hôtel-musée de l’avenue Élisée-Reclus après son arrestation, pendant les troubles de la Libération. Par la suite, ses meilleurs amis furent, jusqu’à leur mort, l’inclassable Colin-Simard, le « bonapartiste » André Castelot, le communiste Stellio Lorenzi et le monarchiste Jean-François Chiappe. Coproducteur avec Pierre Bellemare, au début des années 1960, du jeu télévisé La tête et les jambes, il fit appel au grand caricaturiste de droite Ben, dont les dessins paraissaient à la Une de Rivarol et d’Aspects de la France. Partisan, pendant la guerre d’Algérie, de l’Algérie algérienne, Decaux n’en témoigna pas moins en faveur des défenseurs de l’Algérie française poursuivis par la justice. Et reçu, au début de 1988, à l’émission Sept sur sept (TF1) d’Anne Sinclair, il créa la surprise en remerciant publiquement Jean-Marie Le Pen d’avoir souscrit pour son épée d’académicien.
En 1979, il fit scandale en démontrant, devant des millions de téléspectateurs, que le massacre des officiers polonais à Katyn, en 1943, était imputable aux Soviétiques et non aux Allemands (vérité aujourd’hui reconnue mais qui, alors, ne l’était pas). Il devait récidiver en 1983, en retraçant avec une grande objectivité la vie et l’action de Pierre Laval, ne dissimulant rien des circonstances atroces de son exécution, en 1945, après une parodie de procès. Et, surtout, en 1987, lorsqu’il évoqua avec émotion le destin tragique de Robert Brasillach. Ce qui lui valut des sacs entiers de lettres d’injures. Mais aussi de félicitations. Esprit libre, Alain Decaux était un grand honnête homme.
Christian Brosio
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Hors-série n°3 (automne-hiver 2011). La guerre de Sécession 1861-1865.
Novembre-décembre 2003. Les énigmes du terrorisme. Netchaïev et les nihilistes russes…
Janvier-février 2012. Les intellectuels et la gauche dans la collaboration. Pétain…
Septembre-octobre 2002. L’empire américain, jusqu’où ? Le divorce euro-américain…
La Nouvelle Revue d’Histoire : Vous êtes, François-Bernard Huyghe, le fils de René Huyghe, académicien français qui fut l’un des très grands historiens de l’art du siècle dernier. Quels ont été vos propres centres d’intérêt, quel a été votre parcours personnel et comment en êtes-vous venu à l’étude de la désinformation ?
François-Bernard Huyghe : J’ai des origines flamandes et artésiennes par mon père alors que ma mère était issue d’une famille protestante du sud-ouest. Mon père a écrit sur l’histoire de l’art et l’esthétique mais je me suis orienté vers les sciences politiques. Après un doctorat, j’ai travaillé pour la télévision et pour l’UNESCO, à la division du patrimoine culturel jusqu’en 1987. Ensuite, je suis devenu chercheur indépendant (habilité à diriger des recherches en sciences de l’information et de la communication). J’enseigne à Polytechnique et au CELSA Sorbonne. Je travaille avec Régis Debray – dans les Cahiers de Médiologie puis Médium – sur le rapport entre l’imaginaire, l’histoire et les techniques de transmission.
Je suis directeur de recherche à l’Institut des Relations Internationales et Stratégiques (IRIS). En 1987, j’ai publié chez Robert Laffont La Soft Idéologie, puis, avec ma femme, La Route de la Soie, rééditée chez Payot ainsi que La Route des Épices. Je me suis ensuite spécialisé dans les domaines de la stratégie et des nouvelles techniques de l’information et de la communication, avec L’Ennemi à l’Ère Numérique (PUF, 2001), Les Maîtres du Faire Croire. De la Propagande à l’Influence (Vuibert, 2006) et enfin, tout récemment, La Désinformation. Les Armes du Faux (Armand Colin, 2016). Sur cette dernière question, mon propos n’est pas moralisateur mais analytique. Quels sont les nouveaux moyens de transmission, quel impact sur les mentalités, quel usage stratégique face à un adversaire idéologique ou militaire ?
NRH : Quelle définition peut-on donner de la désinformation et comment doit-on la distinguer de la simple propagande ?
F-BH : La propagande relève d’une positivité séduisante (votez, militez…). Elle vante les réalisations d’un régime ou exalte le camp du bien auquel on est censé appartenir. La désinformation suppose une falsification destinée à tromper l’opinion (et surtout à délégitimer l’autre) ; elle se distingue de la simple intoxication des dirigeants adverses. Le terme « désinformation » est apparu au temps de la guerre froide, même si la pratique de la tromperie et du stratagème est bien plus ancienne : des théoriciens comme Énée le Tacticien ou le Chinois Sun Tzu en traitaient, dès l’Antiquité.
À notre époque, Vladimir Volkoff essaya dans Le Montage – Grand prix du Roman de l’Académie française en 1982 – de cerner les principales méthodes de la désinformation. En 1997, sa Petite histoire de la désinformation en donne une définition : « Une manipulation de l’opinion publique, à des fins politiques, avec une information traitée par des moyens détournés ». La désinformation suppose la propagation d’une information fabriquée en vue d’un effet déstabilisateur (sur un gouvernement, une entreprise, un mouvement d’idées). Dans mon ouvrage, L’Ennemi à l’ère numérique, j’ai proposé : « La désinformation consiste à propager délibérément des informations fausses en les faisant apparaître comme venant de source neutre ou amie pour influencer une opinion et affaiblir un adversaire ».
NRH : Peut-on donner des exemples historiques significatifs d‘actions de désinformation ?
F-BH : L’un des cas les mieux connus est celui du massacre de Katyn, perpétré par les hommes du NKVD soviétique ; ils ont exécuté des milliers d’officiers et de cadres polonais dans une forêt de Biélorussie où les Allemands ont découvert l’immense charnier en 1943. Ce crime a été imputé à la Wehrmacht par les Soviétiques lors du procès international de Nuremberg contre les dirigeants nazis. Au cours des années 1960, un assez large consensus semblait s’établir à ce propos. Il a fallu la fin de l’URSS et l’aveu de la culpabilité soviétique par Mikhaïl Gorbatchev pour que la vérité s’impose.
Durant la guerre froide, les partis communistes, au moment de la guerre de Corée lancent une campagne accusant les Américains de recourir à la guerre bactériologique, ce qui valut au général Ridgway son surnom de « Ridgway la Peste ». Dans le même esprit, au cours des années 1980, se développe la rumeur selon laquelle le virus du SIDA aurait été conçu dans un laboratoire américain au contrôle duquel il aurait échappé. La guerre froide a ainsi été particulièrement favorable au développement de la désinformation. La désinformation diabolise souvent.
NRH : On ne peut limiter les exemples de désinformation au temps de la guerre froide. Les Occidentaux n’ont-ils pas, eux aussi, joué de cette arme pour imposer leurs volontés ?
F-BH : Durant la guerre froide, les Congrès pour la liberté de la culture, organisés par le mouvement anticommuniste mondial, relèvent plus de la public diplomacy, la guerre culturelle et idéologique ; ils ont remporté de notables succès en mobilisant des intellectuels tels que Raymond Aron ou Thierry Maulnier. Mais comment désinformer la Pravda ?
Avec la chute de l’URSS et l’avènement éphémère d’un monde unipolaire sous l’hégémonie nord-américaine, la désinformation est intégrée dans la panoplie occidentale. Cela consiste souvent à imputer à l’adversaire des crimes imaginaires. Le cas le plus exemplaire est sans doute, en 1990, celui des bébés arrachés aux couveuses et agonisant sur le sol d’une maternité koweitienne. Une remarquable enquête de la télévision canadienne a montré qu’il s’agissait d’un montage grossier : « l’infirmière » éplorée qui racontait l’épisode était en réalité la fille de l’ambassadeur koweitien à Washington, de plus absente du Koweit au moment des faits présumés. Une agence de communication avait fabriqué de bout en bout ce récit destiné à discréditer le régime de Saddam Hussein et à justifier l’intervention militaire sous l’égide américaine avec l’accord de l’ONU.
Il y avait eu, en 1989, le précédent du charnier de Timisoara – où l’on « découvrait » des milliers de victimes du régime – utilisé pour accélérer l’élimination du président roumain Ceausescu, tout comme les rumeurs répandues sur l’omnipotente Securitate, la police du régime. L’effet recherché est rapidement atteint et l’on ne s’aperçoit qu’ensuite de l’énormité des mensonges avancés (cadavres « empruntés » à une morgue, etc.). Les mêmes procédés furent utilisés pour discréditer le pouvoir serbe à la fin des années 1990, notamment au Kossovo. Les massacres de « civils » imputés aux Serbes et les images de trains « déportant » les Kossovars, qui avaient vocation à rappeler de manière subliminale les déportations de la Seconde Guerre mondiale, furent largement utilisés. Et l’on se souvient des insultes lancées contre Régis Debray pour avoir eu le malheur de constater, dans un témoignage donné au Monde, que la vie était tout à fait normale à Pristina. Que dire des accusations de détention d’armes nucléaires et chimiques lancées contre Saddam Hussein par Colin Powell devant l’Assemblée générale des Nations Unies ? C’était pour justifier, en 2003 cette fois, la seconde intervention américaine contre l’Irak.
La désinformation peut aussi s’inscrire dans le champ des rivalités économiques. On voit bien comment des acteurs américains ont su compromettre la réussite commerciale du Concorde. Et il en va de même des manœuvres dirigées contre un groupe comme Total, concurrent des majors anglo-saxonnes sur le terrain pétrolier. En même temps, certaines actions de désinformation sont devenues, au fil du temps, de plus en plus faciles à décrypter.
NRH : Les États sont-ils seuls à la manœuvre dans ce type d’opérations ? Quel rôle accorder aujourd’hui à la presse ou aux réseaux sociaux ?
F-BH : Les médias dominants sont évidemment contraints de tenir compte de leur système de financement – intérêts de leurs actionnaires et publicité qu’ils reçoivent – et cela influe sur leur traitement de l’information ou sur sa hiérarchisation. L’idéologie dominante les incite à rendre compte de manière partiale et incomplète des questions relatives à la Russie ou à l’Iran par exemple, alors qu’ils sont infiniment plus discrets sur des « alliés » bien peu fréquentables du camp occidental. Toutes ces contradictions apparaissent clairement à la faveur de la crise du Moyen-Orient en cours.
Mais le phénomène le plus remarquable de ces dernières années réside sans doute dans la « démocratisation » de la désinformation sur les réseaux sociaux. Elle est utilisée dans tous les sens et bénéficie des possibilités qu’offre la technique contemporaine. On peut réaliser en numérique des faux remarquables, notamment en matière de photographies, les diffuser et les faire reprendre par sa « communauté », mais leur repérage est également techniquement plus facile ; ainsi se développent parallèlement les possibilités de diffusion ou de dénonciation sur les réseaux sociaux ; les méthodes de vérification aussi sont assez aisées à mettre en œuvre. Reste que la désinformation sur ces nouveaux supports explose du fait d’initiatives d’individus ou de groupes idéologiques : ils compensent leur faible représentativité politique par un activisme très soutenu sur la toile, sans oublier les actions qui continuent à conduire les États.
NRH : L’essor du « complotisme » ne vient-il pas compliquer la donne ?
F-BH : Au moins 15 % du public ne croit plus au discours médiatique dominant, et se persuade que celui-ci véhicule pour l’essentiel des mensonges au service d’intérêts inavouables : cela encourage les internautes à chercher la vérité « ailleurs ». Le cas des attentats du 11 septembre 2001 est à cet égard exemplaire. Sans apporter des interprétations alternatives cohérentes, des milliers d’internautes ont mis en doute le discours « officiel » concernant l’événement. Et ce avec un certain succès entretenu par les doutes apparus à propos de l’enquête ou des légèretés pointées quant à l’action des services de renseignement…
La désinformation. Les armes du faux, par François-Bernard Huyghe
Le complotisme correspond à un système mental ; il offre une relecture des événements sur la base d’une démarche a priori hypercritique (coïncidences bizarres, contradictions dans la « version officielle », etc.) mais qui aboutit à la conclusion que tout est truqué par des manipulateurs tout-puissants (services gouvernementaux, sociétés secrètes…). Le problème de cette pseudo-explication est qu’un trucage de cette ampleur impliquerait beaucoup trop de monde, des milliers de complice parfaits et qui gardent le silence des années. Ce n’est guère crédible, quand on pense à ce qu’impliquerait la falsification du 11-Septembre. Plus généralement, « tout » ne peut avoir une cause unique, elle-même réductible à la volonté d’une minorité. Il faut compter, dans l’histoire, avec le hasard et l’imprévu : les prospectives imaginées dans le passé se sont bien rarement confirmées dans les faits, à l’horizon ne serait-ce que de quelques décennies. A fortiori les plans de conquête du monde ou des esprits.
Ne confondons pas le « système » en place, au sens d’une réalité qui combine la soumission des intérêts économiques ou sociaux et le pouvoir d’une nomenklatura politico-médiatique qui se présente comme autorité morale exclusive, et, d’autre part, un supposé « complot », thèse qui séduit incontestablement des groupes et des réseaux importants mais qui s’effondre sous l’inflation des explications concurrentes. Le complotisme, en somme, c’est imaginer que tout est désinformation, sauf un fait imaginaire : qu’un groupe d’hommes tout puissants puisse entièrement mettre en scène le réel.
Parallèlement, la désinformation étant ainsi banalisée, à portée de souris, l’accusation de désinformation portée contre toute thèse qui contrarie la vision idéologique dominante prospère. C’est l’escalade dans l’accusation mutuelle de désinformation : le manipulateur c’est l’autre.
Les batailles d’interprétation autour du crash de l’avion abattu au-dessus de l’Ukraine fournissent un bon exemple des possibilités ainsi ouvertes. Dans ce dernier cas, il est bien clair que les mensonges ne sont pas tous du même côté…
NRH : Les dénonciations du « complotisme » ne participent-elles pas elles-mêmes de la « désinformation » ?
F-BH : Nous en sommes arrivés à un stade nouveau de ce débat. L’État, ou ce que j’ai appelé le « système », tend à dénoncer le « danger intellectuel » et moral du « complotisme », à exploiter cet argument sur le terrain idéologique et, par là, à disqualifier la critique comme produit d’esprit paranoïaques (ou de malheureux naïfs égarés par les délires qui traînent sur Internet). C’est sur ce terrain qu’est notamment attaqué l’intellectuel américain Noam Chomsky, critique redoutable du modèle états-unien. Or il y a quand même une différence entre dénoncer le pouvoir de la finance et croire au pouvoir occulte des Illuminati ou des extra-terrestres.
L’accusation de « complotisme » se transforme en argument incapacitant pour borner le débat aux propositions « acceptables ». L’usage du mot peut se comparer à celui du terme « populisme » utilisé, sans avoir fait l’objet d’une définition précise, contre tous ceux qui remettent en cause l’ordre établi dans la sphère occidentale. En économie, le seul discours ayant droit de cité dans le cadre du libéralisme dominant est présenté par les « experts » du « cercle de la raison », sans que les tenants de propositions alternatives aient vraiment voix au chapitre. Ceci reflète en retour l’incapacité des « élites » dominantes à comprendre que l’on puisse s’opposer à elles, sauf à être considérés soit comme des victimes de la « désinformation » soit comme ralliés aux « discours de haine » jugés incompatibles avec les « droits de l’homme ».
NRH : Vivons-nous dans un temps où le mensonge a plus de chances de s’imposer que la vérité ?
F-BH : Pour reprendre la formule de Guy Debord, « le vrai est devenu un moment du faux » ; mais il y a une consolation : l’accès rapide aux énormes archives que la technologie rend accessibles suscite des situations nouvelles. Notamment celles révélée par l’affaire des « lanceurs d’alerte ». Julian Assange, Edward Snowden ou le soldat Bradley : ces gens étaient intégrés dans des bureaucraties telles que l’armée ou la NSA, et, par un scrupule moral qui les conduit à détruire leur vie, ils diffusent des documents authentiques révélant des crimes ou des dysfonctionnements. Les révélations de ces nouveaux dissidents sont relayées et expliquées par des titres de la presse mondiale. La technologie et la production par les bureaucraties de gigantesques archives numériques impliquent ce risque de diffusion : le même principe vaut aussi, on l’a vu récemment pour l’État islamique.
Dans le « brouillard du réel », il est facile de construire autour d’un groupe une version particulière d’une réalité qui fait l’objet d’interprétations concurrentes et de se renforcer collectivement dans ses convictions. Nous sommes ainsi passés au stade où l’on se réfère théoriquement au même monde, mais chacun produit des images radicalement différentes de la réalité.
D’où la nécessité d’une analyse toujours plus documentée des faits et du rejet des lectures trop simplificatrices et exclusives du réel. C’est une condition indispensable à l’intelligence et à la maîtrise du monde qui vient.
Propos recueillis par Pauline Lecomte
Docteur d’État en sciences politiques, Francois-Bernard Huyghe est directeur de recherche à l’IRIS. Il vient de publier aux éditions Armand Colin, La désinformation. Les armes du faux.
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Juillet-août 2003. Le choc des civilisations dans l’histoire. Les guerres…
Septembre-octobre 2012. Les droites radicales en Europe, 1900-1960. L’Action…
Janvier-février 2007. La religion et la politique. Islam et laïcité : mariage impossible ?
Juillet-août 2014. 1214, Bouvines et Saint Louis. Notre beau Moyen Âge…
Tournant de la Deuxième Guerre mondiale, l’offensive Barbarossa, déclenchée le 22 juin 1941, marque le point d’aboutissement du grand suicide européen entamé en 1914.
Le Führer et le « Petit Père des Peuples » s’étaient entendus en août 1939, lors de la signature du pacte germano-soviétique, pour remettre à plus tard un affrontement que l’un comme l’autre jugeait à terme inévitable, mais l’accord conclu leur avait permis de se partager à moindre coût l’Europe orientale. La Pologne anéantie et les États baltes privés de leur éphémère indépendance, l’ordre nouveau ainsi établi pouvait satisfaire les maîtres de Berlin et de Moscou. Mais, une fois la victoire obtenue à l’ouest à l’été 1940, Hitler fut naturellement tenté d’engager la lutte avec une Russie soviétique qui se voulait la patrie d’une révolution communiste à vocation universelle.
Avec une Angleterre contrainte pour longtemps à la défensive et avec une Amérique résolument isolationniste, quelle qu’ait été la volonté interventionniste de Roosevelt, Hitler pouvait penser que la victoire sur l’URSS était à sa portée. Les difficultés rencontrées par l’Armée rouge en Finlande et l’épuration radicale qu’avaient subie ses états-majors pouvaient laisser penser que la mise en œuvre de la blitzkrieg aéroterrestre victorieuse en Pologne, en France et dans les Balkans ne laissait que peu de chances aux Soviétiques. C’était toutefois négliger le succès rencontré en 1939 contre les Japonais sur les frontières mongoles et sous-estimer les atouts géostratégiques majeurs dont bénéficiait la Russie – l’espace, les conditions hivernales, le volume des ressources humaines – qui avaient conduit à l’échec Charles XII et Napoléon.
Certains attendaient de l’Allemagne qu’elle fît un autre choix. Le géopoliticien Karl Haushofer appelait de ses vœux depuis longtemps une grande alliance continentale germano-russe, celle qui s’était opérée de fait avec les accords de Rapallo de 1922, et qui semblait avoir été réactualisée par le pacte d’août 1939. Mais l’anticommunisme farouche de Hitler et sa volonté de bâtir à l’est un lebensraum, un espace vital propice à l’expansion allemande, allaient naturellement contre un rapprochement entre Germains et Slaves.
Malgré l’engagement d’effectifs et de moyens colossaux, l’opération Barbarossa – qui devait, avant l’hiver, conduire les troupes allemandes jusqu’à la Volga – ne put atteindre les objectifs fixés. Malgré des pertes énormes, les forces soviétiques surent faire preuve d’une capacité de résilience inattendue et l’arrivée précoce du général Hiver se révéla fatale à la guerre de mouvement engagée par la Wehrmacht. La résistance de Moscou sonna le glas, dès la fin de l’année 1941, des espoirs allemands d’une victoire rapide. Malgré les succès obtenus au printemps 1942, quand les assaillants atteignirent le Caucase, il ne fut jamais possible d’obtenir la victoire décisive qui aurait pu être fatale au régime soviétique.
Staline sut aussi, en faisant preuve de beaucoup de pragmatisme, réveiller le sentiment patriotique russe en invoquant, contre l’envahisseur, les mémoires d’Alexandre Nevski et de Koutouzov, alors que les Allemands – initialement bien accueillis en diverses régions, notamment en Ukraine, par une population hostile au régime soviétique – ne surent à aucun moment exploiter les opportunités que leur offrait cette situation.
On connaît la suite : une Russie d’Europe dévastée, des pertes terrifiantes pour les deux adversaires, une Allemagne totalement écrasée à l’issue de la guerre, une Europe bientôt divisée par la guerre froide pendant près d’un demi-siècle… Alors que la Russie, débarrassée du communisme, revient dans le jeu des puissances, il apparaît plus nécessaire que jamais d’en finir avec un passé conflictuel qui s’est révélé catastrophique pour notre continent. Il est indispensable et urgent de tourner la page du « tragique XXe siècle » pour construire le vaste espace civilisationnel qui, de l’Atlantique à la Sibérie, sera en mesure de peser dans l’histoire du monde à venir.
Philippe Conrad
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— La NRH (@revuenrh) 30 avril 2016
L’immensité de l’espace concerné, le volume des moyens et des effectifs engagés, l’ampleur des sacrifices consentis et l’acharnement des combats ont fait de la campagne de Russie engagée par Hitler la séquence la plus terrifiante de la Deuxième Guerre mondiale.
On sait comment les deux signataires du pacte de non-agression d’août 1939 en sont venus à s’affronter dans un conflit total qui devait décider pour un demi-siècle de l’avenir de l’Europe, mais qui n’en demeure pas moins méconnu. Dans son livre intitulé Le Brise-glace, Victor Souvorov a soutenu l’idée de l’imminence d’une attaque soviétique à l’été 1941, mais les chefs de l’Armée rouge, qui avaient mis en œuvre des préparatifs en ce sens, se sont heurtés à la volonté de Staline, opposé à l’idée d’une guerre préventive contre Hitler.
Les succès initiaux remportés par l’offensive Barbarossa n’ont pas permis d’atteindre les objectifs prévus dans la mesure où l’espace russe et le général Hiver ont été fatals à la blitzkrieg allemande. Notre dossier est aussi l’occasion de regards sur l’Ukraine déchirée par la guerre, sur les officiers allemands ralliés à la cause soviétique, sur la présence des Français dans cette guerre à l’Est : les « Malgré-nous » alsaciens-lorrains, les pilotes de l’escadrille Normandie-Niémen ou, dans le camp adverse, les combattants de la Légion des volontaires français contre le bolchevisme.
La Nouvelle Revue d’Histoire
Hitler contre Staline, ou le naufrage de l’Europe. Par Philippe Conrad
La désinformation. Entretien avec François-Bernard Huyghe. Propos recueillis par Pauline Lecomte
Le billet inattendu de Péroncel-Hugoz : Louis Bertrand ou la Latinité diabolisée
Retour sur une œuvre majeure : entretien avec Emmanuel Le Roy Ladurie. Propos recueillis par Pascal Cauchy
Babeuf ou l’infortune de l’égalité. Par Martin Benoist
Les politiques et la conduite de la guerre. Par Rémy Porte
Le rêve européen de Drieu la Rochelle. Par Arnaud Guyot-Jeannin
1947. L’état face à la menace communiste. Par Arnaud Benedetti
Roosevelt et Pie XII. Par Emmanuel Huyghues Despointes
Marguerite d’Angoulême. Par Emma Demeester
Marguerite d’Angoulême et son temps
Le château de Gaillon. Par Constance de Roscouré
Les Sept Samouraïs. Par Philippe d’Hugues
Actualité des livres historiques
Philippe Ariès. Par Olivier Zajec
Novembre-décembre 2009. L’Allemagne, mille ans d’histoire. Le mur de Berlin et la fin…
Novembre-décembre 2011. Louis XIV admiré et contesté. La prise de pouvoir du jeune…
Janvier-février 2008. Trotski et le trotskisme. Stéphane Courtois : la mort des…
Janvier-février 2010. Napoléon, l’Empereur vu d’Europe. Angleterre : l’ennemi admiré…
Arrivé en banlieue parisienne, il obtient un emploi de gardien d’immeuble bien qu’il ne parle pas français. Mais il doit faire face aux trafiquants de drogue. Lorsqu’une fusillade éclate entre deux bandes rivales, la police n’intervient pas. Dheepan découvre que venir dans une cité française ne lui a pas permis de fuir la violence aveugle de la guerre civile ! Il va renouer avec ses instincts guerriers pour protéger sa famille…
Réalisé par Jacques Audiard, Dheepan a obtenu la Palme d’or au Festival de Cannes en 2015. En décrivant une cité délabrée et abandonnée aux trafiquants, il révèle de nombreux aspects de l’immigration souvent occultés par le cinéma français. Un film à voir absolument !
Dheepan, UGC Vidéo, 20 €
Mars-avril 2014. La Renaissance, mythe et réalité. Moyen Âge et Renaissance…
Juillet-août 2012. La Prusse et la France 1712-2012. Frédéric Le Grand vu d’Allemagne…
Septembre-octobre 2015. 1985-1991 La fin de l'illusion soviétique. François 1er…
Mai-juin 2006. 1916 : l’année de Verdun. La grande bataille des Français…
Aux sources de l’autonomisme alsacien-mosellan (1871-1945)
La voie de cette identité tout à la fois française et germanique ne cesse cependant d’intriguer. Militant autonomiste, diplômé de l’institut d’études politiques (IEP) de Strasbourg, l’auteur nous en propose une histoire certes engagée, mais très documentée.
Héritière d’une longue tradition, la revendication autonomiste contemporaine s’affirme dès 1874, trois ans après le rattachement de l’Alsace et de la Moselle au Reich allemand. C’est « l’âge d’or » du Reichsland Elsass-Lothringen, qui se voit accorder par Berlin, en 1911, une constitution, un gouvernement régional et une assemblée – le Landtag. L’autonomisme renaît dans le cadre français et, dès 1928, les Alsaciens-Mosellans envoient une majorité de députés autonomistes à l’Assemblée nationale.
La Seconde Guerre mondiale constitue en revanche une rupture : rattachée au pays de Bade pour former le Gau Oberrhein au sein du IIIe Reich, la région doit fournir 135 000 « malgré nous » aux armées allemandes avant de subir une sévère épuration à la Libération. Le particularisme des « départements recouvrés » est cependant immédiatement réaffirmé, contrairement aux hésitations manifestées par la République en 1919, et c’est dans ce cadre que la défense de l’identité régionale trouve aujourd’hui un écho de plus en plus puissant.
Aux sources de l’autonomisme alsacien-mosellan (1871-1945). Par Michel Krempper, Éd. Yoran Embanner, 390 p., 20 €
Novembre-décembre 2015. Scandales financiers, corruption politique. La…
Juillet-août 2015. Louis XIV, l’homme et le roi. Comment penser l’État : entretien avec…
Novembre-décembre 2009. L’Allemagne, mille ans d’histoire. Le mur de Berlin et la fin…
Novembre-décembre 2005. Nos ancêtres les Celtes et les Gaulois. Mille ans d’histoire…
Elle décrit, au début du XXe siècle, la vie de la famille Crawley et de ses domestiques. La reconstitution historique est très convaincante. Elle prône la vision d’une Angleterre conservatrice et fière de ses traditions.
Chacun, aristocrate ou domestique, avait sa place. Les domestiques défendaient ainsi farouchement l’honneur de leurs maîtres.
Les nombreux inconditionnels espèrent maintenant la réalisation d’un long métrage…
Downton Abbey, Saison 6, Universal Pictures, 25 €, Intégrale 100 €
Mai-juin 2008. Mai 68, les enfants du gaullisme. De mai 58 à mai 68, une autre…
Hors-série n°2 (printemps-été 2011). La Vendée et la Terreur. Le peuple contre…
Janvier-février 2016. De Gaulle et les Américains. 1940-1945 : le duel De Gaulle-…
Janvier-février 2011. Les hommes et la guerre. Guerre juste. Croisades et Djihad. Les 40…
L’art militaire de Napoléon, de Jacques Garnier
Jusque-là, on lui devait des études de détail, érudites à souhait. Ici, le projet est plus ambitieux car cet Art militaire de Napoléon se veut aussi une « biographie stratégique ». Les guerres menées par Napoléon Bonaparte ne sont pas loin de clore une pratique de la guerre née au début du XVIe siècle, avec ce qu’on appelle la « révolution militaire ». En l’occurrence la diffusion et la montée en puissance des « bouches à feu » et, en vis-à-vis, la mutation des systèmes de défense et de fortification pour mieux leur résister.
Napoléon innove peu, plutôt conservateur au niveau technique, mais il se révèle un vrai chef de guerre maîtrisant l’« art opératif » qui combine tactique et portée stratégique. Tout cela au service d’un projet politique : dominer l’Europe, la vassaliser autour d’un Grand Empire qui renoue avec celui de Charlemagne.
Garnier passe en revue les campagnes, s’attarde sur les batailles qui ont fait la légende de Napoléon – Austerlitz, « bataille parfaite » – et sa perte, Leipzig, Waterloo… Un dernier chapitre évoque l’empreinte et l’écho de ce chef de guerre, hors du commun. À souligner, un très beau jeu de cartes qui éclaire la réflexion de l’auteur.
Jean-Joël Brégeon
L’art militaire de Napoléon, de Jacques Garnier, Perrin, 350 p., 23 €
Mars-avril 2011. L’Italie. De la chute de Rome à l’unité de 1861. Haut Moyen Âge, une Italie…
Mars-avril 2016. Irlande rebelle. L'île des saints et des savants. La grande famine…
Juillet-août 2002. 5000 ans de civilisation européenne. La femme en…
Mai-juin 2013. Glorieuses défaites et grandes sagas. Camerone : 150 ans.
Pour changer le cours de la guerre, les Japonais créent une nouvelle arme kamikaze : la Kaiten. Cette torpille-suicide chargée d’explosifs, avec un poste de pilotage rudimentaire, est lâchée par de vrais sous-marins à proximité de l’ennemi…
La série L’Île des téméraires décrit la phase de formation des pilotes et le déroulement des attaques. Le dessinateur de mangas Syuho Sato nous fait découvrir le destin des volontaires prêts à mourir pour leur patrie.
Il démontre que les terribles bombardements américains des villes japonaises renforcent leur détermination.
Son dessin nerveux crée une ambiance sombre qui révèle le crépuscule de la Marine impériale japonaise.
L’Île des téméraires, t. 6, Éd. Kana, 8,75 €
Novembre-décembre 2003. Les énigmes du terrorisme. Netchaïev et les nihilistes russes…
Septembre-octobre 2013. Le Midi, les troubadours et les cathares. Le miracle…
Janvier-février 2012. Les intellectuels et la gauche dans la collaboration. Pétain…
Janvier-février 2011. Les hommes et la guerre. Guerre juste. Croisades et Djihad. Les 40…
Les six miliciens de Grenoble, de Pascal Cauchy
La scène se déroule à Grenoble le 2 septembre, à l’issue d’un procès expéditif, conclu sur la condamnation à mort de six des dix accusés, de jeunes miliciens qui, dans le climat de l’époque, avaient peu de chances d’échapper à leur sort. Le nouveau préfet de l’Isère a expliqué, dans une déclaration à la presse, que les maquisards avides de vengeance cherchaient à forcer les prisons et « qu’un jugement et une exécution légales sont préférables à de nombreux lynchages ».
Maître de conférences à l’IEP et chercheur au Centre d’histoire de Sciences Po, Pascal Cauchy a réalisé à propos de cet épisode une enquête originale qui restitue au plus près l’atmosphère de cette époque troublée. Il pointe notamment « le rôle des communistes qui appellent à la violence, réclamant la foule, calculant l’effet politique ; c’est de ce côté que se développe une mystique de la violence épuratrice qui, chevauchant le tigre des passions populaires, noue la résistance intérieure à l’histoire révolutionnaire du pays ».
Ce travail documenté et rigoureux, mais néanmoins passionnant, pourrait constituer un modèle pour approcher au mieux d’autres moments analogues de ces sombres années.
Les six miliciens de Grenoble, par Pascal Cauchy, Éditions Vendémiaire, 222 p., 19 €
Hors-série n°6 (printemps-été 2013). Napoléon. Leipzig 1813. La fin de l’Empire…
Mai-juin 2016. 1941-1945 : Front de l’Est. Le renseignement avant Barbarossa…
Hors-série n°9 (automne-hiver 2014). Conquêtes et sociétés coloniales.
Mars-avril 2003. La Russie et l’Europe. Pierre Le Grand, tsar génial et féroce…
Auréolé du succès d’Autant en emporte le vent, Victor Fleming, consacre en 1948 son dernier film à Jeanne d’Arc. Il respecte la chronologie en insistant sur la foi chrétienne inébranlable de Jeanne.
C’est la raison pour laquelle la critique s’est acharnée sur ce film hagiographique. Ce film qui avait été réduit à 99 minutes au montage retrouve enfin sa véritable longueur de 145 minutes. Cette version longue montre que le désastre n’a pour cause que nos reniements et notre défaitisme. Malgré son âge (33 ans), Ingrid Bergman est possédée par la grâce de Jeanne.
Jeanne d’Arc (version longue), Éd. L’Atelier d’Images, DVD 14,99 €, Blu-Ray 19,99 €
Janvier-février 2007. La religion et la politique. Islam et laïcité : mariage impossible ?
Septembre-octobre 2011. L’imprévu dans l’histoire. Octave, l’improbable fondateur…
Novembre-décembre 2008. 1918 la grande illusion. Les équivoques du nationalisme…
Mai-juin 2015. La Suisse, de Guillaume Tell à Freysinger. Identité et démocratie…
HMS. L’intégrale
Recruté de force sur le HMS Danaé, il se retrouve matelot puis officier-médecin de bord. Il va élucider une série de meurtres liés au trésor des royalistes fuyant la Révolution française.
L’Amirauté lui propose alors de devenir agent secret de Sa Majesté. Il va être mêlé, dans la mer des Antilles, à la révolte des Caraïbes noirs contre l’Empire britannique…
Roger Seiter crée un scenario un brin compliqué mais qui a le mérite de dévoiler la vie des marins à bord des navires de guerre. Johannes Roussel dessine parfaitement les navires, costumes et scènes de bataille navale.
HMS, Éd. du Long Bec, 312 p., 39,50 €
Janvier-février 2008. Trotski et le trotskisme. Stéphane Courtois : la mort des…
Mai-juin 2014. Identité et devenir de l’Europe. L’empire de Charlemagne…
Juillet-août 2008. L'Espagne de la Reconquista. Huit siècles de conquête…
Mars-avril 2007. La République et la France. 1789-1989 : une histoire troublée…