La Nouvelle Revue d'Histoire : "L'histoire à l'endroit". Fondée en 2002 par Dominique Venner et dirigée par Philippe Conrad.

Affirmer le principe de sa souveraineté tout en s’adaptant, avec réalisme, aux circonstances : telle fut la ligne de conduite de Frédéric II.

Frédéric II un empereur de légendes, de Sylvain Gouguenheim

Frédéric II un empereur de légendes, de Sylvain Gouguenheim

Source : La Nouvelle Revue d’Histoire n°83, mars-avril 2015. Pour retrouver ce numéro, rendez-vous sur la e-boutique en cliquant ici.

En son temps, Jacques Benoist-Méchin avait consacré à Frédéric II une biographie marquée par l’empathie évidente de l’auteur avec son sujet. Ce livre attrayant incitait le lecteur à approfondir la découverte du personnage hors du commun que fut le dernier empereur Hohenstaufen. C’est ce que permet l’ouvrage de Sylvain Gouguenheim, auteur d’études remarquées (Les Chevaliers teutoniques, Tallandier, 2007) sur le monde germanique au Moyen Âge.

Sylvain Gouguenheim, Frédéric II un empereur de légendes

Sylvain Gouguenheim, Frédéric II un empereur de légendes

Fils de l’empereur allemand Henri VI et de la reine de Sicile Constance, Frédéric était donc à la fois l’héritier de la lignée impériale des Hohenstaufen et des rois normands de Sicile. Mais, orphelin à quatre ans, il grandit à la cour de Palerme dans une ambiance de guerre civile, au milieu des intrigues de ceux qui convoitaient le pouvoir, « agneau parmi les loups » selon l’expression d’un chroniqueur. Son parrain le pape Innocent III, censé être son protecteur, était surtout soucieux de soumettre une bonne fois le pouvoir impérial à la papauté.

À sa majorité, en 1208, Frédéric s’employa à traduire dans les faits son autorité de roi de Sicile. Il fit de cette terre un État modèle, par le renforcement et le contrôle des institutions, l’organisation des assises de Capoue (1220), la soumission des barons et des musulmans révoltés (1220-1224), la création d’une université à Naples, la promulgation de règles juridiques (Liber augustalis en 1231) et fiscales.

Parallèlement, il s’employa à remettre de l’ordre en Allemagne, où il fut reconnu comme « roi des Romains » par le couronnement du 25 juillet 1215, avant d’accéder au titre impérial en 1220. À cette date, il avait réussi à imposer son pouvoir régalien pour régler les conflits, octroyer ou confirmer des privilèges, contrôler les domaines royaux. Ceci au prix d’un compromis avec les princes d’Empire, laïcs et ecclésiastiques, reconnus comme maîtres de vastes principautés territoriales. L’édit de paix promulgué à la diète de Mayence (le premier en langue allemande) imposa à l’ensemble du royaume des mesures assurant l’ordre public. En accordant à Lübeck le statut de ville libre d’empire (1226), en laissant à l’Ordre Teutonique le champ libre en Prusse, il s’assurait de solides fidélités.

Affirmer le principe de sa souveraineté tout en s’adaptant, avec réalisme, aux circonstances : telle fut la ligne de conduite de Frédéric II. Sylvain Gouguenheim réussit à présenter dans son ouvrage une synthèse de sa pratique du pouvoir, une analyse des images qu’il a voulu laisser de son règne, les représentations et légendes tissées à son sujet par ses contemporains et la postérité. Du beau travail.

Bernard Fontaine

À propos de

Sylvain Gouguenheim, Frédéric II un empereur de légendes, Perrin, 428 p., 24 €

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