Les Hohenzollern, la dynastie qui a fait l’Allemagne
Parfait connaisseur du monde germanique, Henry Bogdan était tout désigné pour nous exposer ce que furent les destinées de la maison de Hohenzollern.
Henry Bogdan s’est imposé ces dernières années comme un spécialiste incontesté de l’histoire de la Mitteleuropa. Outre les ouvrages qu’il a consacrés – dans le contexte du démembrement de l’Empire soviétique – aux divers peuples qui lui furent soumis, le grand public cultivé a découvert grâce à lui l’histoire de La Guerre de Trente Ans, celle des Habsbourg et, plus récemment, celle de la Lorraine des ducs. Parfait connaisseur du monde germanique, Henry Bogdan était tout désigné pour nous exposer ce que furent les destinées de la maison de Hohenzollern. Par ses qualités narratrices et didactiques, l’ouvrage qu’il vient de lui consacrer confirme sa capacité à réaliser de vastes synthèses. Appuyées sur une parfaite érudition, celles-ci n’en demeurent pas moins, sur des sujets peu familiers aux lecteurs français, d’un accès aisé.
L’auteur retrace ainsi ce que furent les origines d’une famille établie en Souabe et en Forêt Noire. Elle imposa initialement son pouvoir en Allemagne du sud, à la faveur d’un mariage heureux avec la fille d’un burgrave de Nuremberg. Maître des margraviats d’Ansbach et de Bayreuth, Louis Frédéric Ier devint en 1415, par la volonté de l’Empereur Sigismond de Luxembourg, margrave de Brandebourg, déplaçant ainsi vers le nord-est de l’espace germanique le centre de gravité des possessions de sa lignée. Une étape décisive puisque, deux ans plus tard, le margrave devint prince électeur de l’Empire.
Enrichi des duchés de Clèves et de Prusse, le Brandebourg va s’imposer au XVIIe siècle, sous l’autorité du Grand Électeur Frédéric-Guillaume – vainqueur des Suédois à Fehrbellin – comme l’une des puissances principales au sein de l’ensemble allemand. C’est le fils et successeur du grand Électeur, Frédéric III, qui recevra en 1701 à Koenigsberg la couronne de Prusse, sous le nom de Frédéric Ier.
À partir de ce moment, l’histoire des Hohenzollern se confond avec celle du nouveau royaume, appelé à s’imposer comme une grande puissance à la faveur du règne du roi-sergent Frédéric-Guillaume Ier et de son fils Frédéric II, futur vainqueur de Rossbach et de Leuthen. Souverain éclairé ami de Voltaire, Frédéric II fit de Berlin l’une des capitales des Lumières.
C’est sous le règne de Frédéric-Guillaume III, veuf de la reine Louise – l’âme de la résistance anti-française après Iéna – que se réalisa la croisade de libération dont la Prusse prit la tête en 1813, se posant ainsi comme l’État le mieux placé pour cristalliser en Allemagne les espoirs d’unité nationale.
Henry Bogdan éclaire les faiblesses de Frédéric-Guillaume IV confronté aux révolutions de 1848, mais aussi l’habileté et le pragmatisme d’un Bismarck, démiurge inspiré de l’unification allemande. Il remet heureusement à leur place bon nombre d’idées reçues relatives au kaiser Guillaume II et confirme l’hostilité de ce dernier au national-socialisme hitlérien. Un ouvrage aussi nécessaire qu’éclairant à propos d’une histoire allemande dont la connaissance apparaît indispensable à toute réflexion consacrée au passé de notre Europe.
Philippe Conrad
À propos de
Les Hohenzollern. La dynastie qui a fait l’Allemagne (1061-1918). Par Henry Bogdan, Perrin, 410 p., 25 €
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