La Nouvelle Revue d'Histoire : "L'histoire à l'endroit". Fondée en 2002 par Dominique Venner et dirigée par Philippe Conrad.

En plusieurs chapitres lumineux, l'auteur décrit la situation conflictuelle de 1410 qui oppose la puissance de l’Ordre teutonique, modèle d’État « moderne » colonisateur et militaire, à un pouvoir féodal s’étendant sur la Pologne et la grande Lituanie de l’époque.

Tannenberg. 15 juillet 1410

Tannenberg. 15 juillet 1410

Source : La Nouvelle Revue d’Histoire n°64, janvier-février 2013. Pour retrouver ce numéro, rendez-vous sur la e-boutique en cliquant ici.

La bataille de Tannenberg (Grunwald pour les Polonais) est entrée avec la force d’un mythe dans la mémoire européenne.

C’est là que fut livrée en 1410 une bataille catastrophique pour l’Ordre teutonique qui avait colonisé la Prusse orientale et la Courlande depuis le XIIIe siècle. Dans la même région, cinq siècles plus tard, le 1er septembre 1914, le général Hindenburg encercla et écrasa la 1ère armée russe (Samsonov) et mit en déroute la 2ème armée (Rennenkampf) qui auraient dû marcher victorieusement jusqu’à Berlin. Cette deuxième bataille de Tannenberg fut célébrée en Allemagne comme une revanche historique du monde germanique sur le monde slave. À l’inverse, la première bataille, celle de 1410, est devenu l’un des mythes fondateurs de la Pologne, même si, depuis peu, prévaut un apaisement du conflit séculaire entre Germains et Slaves.

Tannenberg. 15 juillet 1410

Tannenberg. 15 juillet 1410

Pour des raisons évidentes tenant à la richesse des archives et des récits, la bataille de 1914 est connue avec une précision qui fait défaut pour 1410. Pour cette raison, il faut saluer le travail exemplaire de reconstitution et de discussion des sources réalisé par Sylvain Gouguenheim. Médiéviste réputé, professeur d’histoire médiévale à l’ENS-LHS de Lyon, auteur de plusieurs ouvrages de référence, dont Les Chevaliers Teutoniques (2007), Aristote au Mont Saint-Michel (2008), La Réforme grégorienne (2010), jamais il ne s’abandonne aux facilités d’un récit d’imagination. En plusieurs chapitres lumineux, il décrit la situation conflictuelle de 1410 qui oppose la puissance de l’Ordre teutonique, modèle d’État « moderne » colonisateur et militaire, à un pouvoir féodal s’étendant sur la Pologne et la grande Lituanie de l’époque. Pouvoir dominé par la haute personnalité du roi Jagellon, né païen, et devenu chrétien pour des raisons éminemment politiques. Cette conversion intéressée avait retiré aux Teutoniques leur principale justification politico-religieuse, qui était la conversion forcée des « païens ». Gouguenheim examine les sources d’époque pour en extraire les éléments d’un récit cohérent. Celui d’une défaite qui doit beaucoup à la ruse déployée par Jagellon face aux charges fougueuses des Teutoniques au cours desquelles périt leur grand maître, Ulrich de Jungingen, ainsi qu’un grand nombre de ses chevaliers. Très affaibli par cette défaite, l’Ordre teutonique ne disparut pas pour autant (1). Mais c’en était fini de sa suprématie et de sa réputation d’invincibilité.

Dominique Venner

Notes

  1. Nous avons évoqué la survie de l’Ordre et sa future mutation dans le n°61 (juillet-août 2012) de La NRH consacré à la Prusse.

À propos de

Tannenberg. 15 juillet 1410. Par Sylvain Gouguenheim, Tallandier, 263 p., index, cartes, 18,90 €

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